L’épinette des montagnes bleues
Tous ces airs ont été enregistrés les samedi 4 et dimanche 5 septembre 1993 à l’église du Haut-du-Tôt sur cassette numérique (DAT). Il s’agit d’un produit exempt de montage, d’effets spéciaux, d’édulcorants.
L’épinette et les voix ont toujours été prises en simultané afin d’en préserver au maximum la fraîcheur, l’arôme et les vitamines.
Remerciements spéciaux pour leur appui logistique ou leur soutien psychologique : Monique Boulangé, Florence Chantal, Jacques Coget, Joëlle Deschamp, Jean-François Dutertre, Philippe Laurent, Christian Maes, Yves Menut, Yves Orel et Martine Thomas.
Remerciements également à tous les souscripteurs pour la confiance qu’ils m’ont accordée en m’aidant à financer cette production.
Christophe Toussaint est maître luthier spécialisé dans la fabrication d’épinettes des Vosges et professeur diplômé d’état en musique traditionnelle.
Christine Roy a prêté l’espace de sa voix sur le dernier titre.
Liste des morceaux joués et enregistrés
1. Trois Maix
Ces trois maix viennent successivement de Dommartin-les-Remiremont (en majeur), puis de Saulxures-sur-Moselotte (en mineur) puis de Ramonchamp (à nouveau majeur). Ils ont été recueillis par le chanoine Hingre au xixe siècle. “Dan ta maison” signifie “devant ta maison”.
2. Le premier jour de mai
Traditionnel francomtois suivi d’un instrumental : Paspie no vois, provenant d’un manuscrit du Flamand van Belle, 1743.
3. Le mai de La Bresse
Le plus simple de nos chants de rogations : il se joue sur trois notes ; mais son caractère rustique associé aux grandioses et rudes paysages bressauds invite à un développement plus ample.
4. La vieille femme amoureuse
Ç’âtó ine vîye = C’était une vieille, a été collecté par Louis Jouve, au milieu du xixe siècle, en Meurthe et Vosges (?).
L’introduction est Le mériège do peut guéchon, chant de Sauville près de Neufchâteau.
5. Le ményanthe du Pré du Thia
Ce chant parle de trèfles d’eau aux abords d’un étang à tourbière flottante. Endroit fabuleux aux eaux noires et délicieusement visqueuses, lieu magique, forêt épaisse hélas perturbée par des motos qu’ils disent vertes !
L’épinette utilisée est celle photographiée sur la couverture de ce livret, accordé e’, d’ pour les chanterelles et g, G, d pour les cordes bourdons.
6. Le pommier doux
Communiqué par Jean-Loup Baly, tous les deux sont francomtois. On entend le mode de ré sur une épinette “oblongue” ou “goutte d’eau” diatonique, instrument créé par mon grand-père Marcel Gaspard.
Accord : c’, g/g, G, d. C’est l’épinette suspendue sur la jaquette, au dos de ce disque.
7. Der arme Bauer
Ce chant en dialecte pägser date du xviie siècle et nous vient du nord de la Moselle.
Le Schniederlehof qui suit parle d’une ferme-musée à Hofsgrund, sur les pentes du Schauinsland, en Forêt Noire.
Traduction, sans garantie, du arme Bauer :
- Oh, je suis un pauvre paysan lorrain
- Comme la vie m’est dure
- Je ne vis ni dedans, ni dehors
- Ma maison est en ruine
- J’ai trois chevaux qui ne valent rien
- L’un va comme ci, comme ça
- Le deuxième n’a que trois dents
- Le troisième est aveugle et si paresseux
- J’ai une vache, dont je n’ai que la moitié
- Le boucher a déjà le veau
- Je n’ai ni foin ni paille
- Le feuillage de la forêt est mon fourrage
- Je suis un pauvre paysan lorrain
- Comme la vie m’est dure
- Mon Dieu, ah plus jamais
- Si seulement j’étais déjà au ciel.
8. C’était un charbonnier
Chant du Jura.
Collectage Grospierre dans “Chansons populaires Comtoises”, tome 1. L’instrumental suivant se nomme Planxty Denis O’Conor, composition de Turlough O’Carolan (1670-1738).
9. Camaïeu pour Armand
Cadeau pour un jeune vosgien né le 17 mai 1991 et à qui je souhaite une existence riche et intense.
La plupart des mélodies de ce patchwork sont en mode de mi.
L’accord de l’épinette “artésienne” (couverture du livret) est ici : d’, b / f#, F#, B.
10. Sens dessus dessous, La différence
Sur deux poèmes de Georges Fischer. L’instrumental intermédiaire, Gentinnes-Kongolo, commémore une rencontre d’épinette en Belgique, octobre 1989.
L’épinette est un petit citera à neuf cordes, œuvre de Tibor Gáts, Budapest.
11. Avant-hier, Angkor
Tirés du livre “Contes courts” de Gilbert Durand.
L’oblongue est accordée bizarrement : d’, a / A, e, soit en ton relatif sol, mi b/ la, ré.
12. J’ai fait une maîtresse
Extrait du tome 1 des “Chansons populaires Comtoises”. L’accord est e’, d’ / g, G, d.
13. Marion s’y promène
Extrait du tome 1 des “Chansons populaires Comtoises”. L’accord est e’, d’ / g, G, d.
14. Arkhana
C’était une petite jument fjord qui ne s’appelait pas Stewball et dont le destin fut aussi bref...
15. Terre
Terre est une poésie de Marie-Paule Brocard, vosgienne de la Vôge.
Accord de l’“oblongue” sol, ré / ré, la. En hauteur absolue la tonalité est la même que pour le “Pommier doux”.
Tu fais haut-vol sur tous les bras tendus, et main basse sur la lumière.
Tu fais le sage et le paisible, mais le cristal se froisse dans tes hauts buffets.
Aux rides de ton œil glissent encore les mots de tous tes amours...
Tu fais l’enfance sur ta joue pour qu’ils s’ouvrent en delta.
Tu cueilles la bruyère puis tu la caches aux chemins creux
Effrayé de la savoir plus forte que toi
Forte de cette terre dont tu t’arraches à chaque pas
Pour d’inutiles courses.
Tu sais bien que le plus beau serait de t’enfoncer là,
Les mains dans tes poches et les semelles collées
Tu porterais les vents pour enfin voyager jusqu’au cœur de toi-même.
Homme de peu de terre, tu bavardes tendre et léger
Tu laisses ta fumée te donner la patience de l’enracinement
Et les vents te simplifier.
Tu fais le voyageur que rien ne retiendra
Pourtant je t’ai vu prendre ta pipe
... et laisser ton tabac.
2023